mercredi 8 avril 2020

"Voici l'homme" - 'Ecce homo'

"Ecce homo" : tableau d'Antonio Ciseri (1871)
Pilate s'adressant à la foule, déclare : "Voici l'homme"
Frères et sœurs, 

Nous voici dans la semaine sainte. Jésus est livré aux mains des hommes. Je voudrais partager avec vous une méditation sur la 6ème station du chemin de croix qui est à Bétharram. Elle est intitulée : VOICI L’HOMME, ECCE HOMO.  

Devant cette 6ème station du chemin de croix, on a simplement envie de garder silence pour que justement dans le silence nous puissions contempler sur la croix : « celui qu’ils ont transpercé... », et qu’aujourd’hui encore sans doute, nous continuions de transpercer. C’est bien dans ce mystère de la croix que le Père en Jésus, révèle pleinement son amour pour chacun, chacune de nous. 

Nous percevons avec quelle noblesse Jésus se soumet aux bons vouloirs de son Père, avec quelle dignité et quelle résolution il monte vers la croix ! Il connaît l’issue du drame. Ce ne sont pas les adversaires qui fixent les délais de la tragédie, mais lui-même et en pleine lucidité. Il ne lui advient que ce qu’il a décidé en filiale obéissance à son Père. « Ma vie, nul ne la prend, c’est moi qui la donne ». S’il le voulait, son Père ne mettrait-il pas « aussitôt à sa disposition plus de douze légions d’anges » ?  Aussi, ravagé par la douleur, sali par la honte, couvert de l’humiliation la plus cuisante, il reste le Seigneur. Jusqu’au bout, il reste lui-même, le Maître de l’Evénement. Ecce homo ! voici l’homme ! Ecce Homo, c’est Pilate présentant Jésus de Nazareth sortant du prétoire, après la flagellation. Ecce Homo, c’est Jésus de Nazareth, debout, couronné d’épines et revêtu d'une cape. En effet, Pilate ne pouvait pas mieux dire. Dans le Christ, Dieu prend visage d’homme. Dans le Christ, homme libre, l’homme trouve son modèle et sa perfection.

Voilà Celui qui est offert à notre "contemplaction". Oui vous l’avez bien compris ! "Comtemplaction" ! Vous voudriez bien accepter ce néologisme. Il s’agit bien d’actionner, de mettre en pratique ce qu’on a contemplé. Ici à Bétharram, la sixième station nous dit l’homme, quand celui-ci est visage de Dieu. Il nous dit jusqu’où l’Amour, est capable d’aller : ce visage abîmé, cet innocent humilié, c’est aussi le visage de la tendresse de Dieu pour l’homme, pour l’homme aujourd’hui face à la pandémie du coronavirus. Ecce Homo, c’est finalement la grandeur de l’amour passionné de Dieu pour l’homme. Et là, nous comprenons en Jésus, ce qu’est l’homme quand il est visage de Dieu.

L’amour de Dieu en Jésus Christ est créateur de vie, même lorsque la maladie, la mort est au rendez-vous. Dans un cœur habité par le Christ, toutes les barrières qui sont mises à la capacité d’aimer, de donner, de pardonner, sont pulvérisées, parce que son amour a été plus fort que toutes les morts qui restreignent et détruisent la vie de l’homme, la mort que provoque le covid 19, la mort qu’est la violence, la mort qu’est l’injustice, la mort que sont l’exclusion, le mépris, la haine, la domination du fort sur le faible.

Alors que nous sommes en train de construire une société où il s’agit d’être toujours plus compétent, toujours plus performant, toujours plus "successfull"… le covid 19 conduit fatalement chacun d’entre nous à faire l’expérience de sa propre fragilité et de la fragilité de notre monde. Il nous fait prendre conscience de notre vulnérabilité. Il frappe tout homme sans distinction, des proches, des personnes que nous aimons. Nous sommes bien fragiles et c’est Dieu qui est fort. 

Chers frères et sœurs, entrons dans notre Semaine Sainte toute particulière cette année, en suivant Jésus à la trace, nous laissant entraîner derrière lui sur le chemin de la croix et de l’abandon. Il nous regarde et nous dit : « Il n’y a pas de plus grande preuve d’amour que de donner sa vie pour ses amis…je donne la mienne librement pour le salut de tous… ma vie, nul ne la prend mais c'est moi qui la donne… » C’est bien ce que font autour de nous tant d’hommes et de femmes du corps médical, personnel soignant. Ils donnent leur vie pour sauver d’autres vies. Ils ont compris, eux, que l’homme n’est pas un pur instrument. Ils ont compris, eux, qu’il y a, en l’homme, quelque chose de tellement unique, de tellement prodigieux et qu’il n’est pas un rat de laboratoire. Ils ont compris, eux, que le Règne de Dieu ne peut s’affirmer que dans le règne de l’homme. Il s’agit de l’homme, de chaque homme, de tout homme vivant sur cette planète…

Sachons ajuster notre amour à celui du Christ qui éclate en lumière au matin de Pâques.

P. Sylvain DANSOU, scj

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