mardi 7 avril 2020

L’après Judas et l’aujourd’hui de l’Église ?

Le baiser de Judas
Jean 13,21-33.36-38 : l'Evangile du jour est à lire sur le site AELF (ci-contre)

« Amen, amen, je vous le dis : l’un de vous me livrera », c’est l’annonce solennelle de Jésus sur la trahison de l’un des douze, Judas.  En faisant précéder l’annonce par deux « Amen », le Christ donne à cet acte un rôle significatif dans l’accomplissement de sa mission salvifique. Le Pape Benoît XVI, lors de la catéchèse du 18 octobre 2006, s’interroge comme bon nombre de chrétiens : « Pourquoi a-t-il trahit Jésus ? » Une autre question peut encore se poser : pourquoi Dieu a-t-il permis que Judas soit le traître de son Maître ?

Ces questions peuvent nous interpeller et susciter plusieurs questions en rapport avec cette épidémie du Coronavirus. Alors qu’on s’apprête à célébrer une semaine sainte dans le confinement, on peut se dire pourquoi Dieu a permis que ses enfants puissent célébrer le mystère de Pâques dans le confinement total ? Pourquoi le monde est-il paralysé d’un seul coup et de la même façon dans tous les continents ?

En répondant à la question du pourquoi de la trahison de Judas, le Pape Benoît XVI se penche sur la dépravation du cœur de Judas et son consentement à la sollicitation du démon qui était entré en lui. S’inspirant du chapitre V de la règle fondamentale de saint Benoît : « ne désespère jamais de la miséricorde divine », Benoît XVI suppose en réalité que « Dieu "est plus grand que notre cœur" » (1 Jn 3,20). En ce sens, l’acte de Judas peut présenter deux interprétations. La première : « Jésus respecte notre liberté. » La deuxième : « Jésus attend notre disponibilité au repentir et à la conversion ; il est riche en miséricorde et en pardon. » 

Par ailleurs, pourquoi Dieu a-t-il permis que son Fils soit livré ? Le Pape émérite affirme : « lorsque, nous pensons au rôle négatif de Judas dans l'histoire de Jésus, nous devons l'intégrer dans la conduite supérieure des événements de la part de Dieu. Sa trahison a eu pour conséquence la mort de Jésus, qui transforma ce terrible supplice en espace d'amour salvifique en se livrant soi-même au Père (cf Gal 2.20 ; Eph 5,2.25). Le Verbe "trahir" est la version d'un mot grec qui signifie "livrer". Parfois son sujet est même Dieu en personne : c'est lui qui par amour "livra" Jésus pour nous tous (cf Rm 8,32). Dans son projet salvifique mystérieux, Dieu assume le geste inexcusable de Judas comme occasion du don total de son Fils pour la rédemption du monde. »

Pourquoi Dieu a-t-il permis que le monde soit éprouvé si douloureusement ? Coronavirus a-t-il endossé le rôle de Judas pour que l’homme prenne conscience de son éloignement à Dieu ? Dans la compréhension de la mort de Jésus, Judas est vu comme un instrument de Dieu dans le rôle du traître. Il a contribué négativement à la réalisation du mystère du salut. C’est pour dire que d’un mal peut venir un bien, et Dieu seul sait où il veut en venir.  

Des lueurs d’espoirs semblent se dessiner et dans plusieurs pays le nombre de contaminations au coronavirus est stable. Cette lueur coïncide avec la Pâques de notre Seigneur Jésus Christ. Il nous faut lire les signes de l’amour de Dieu qui nous fait passer dans le désert et le jardin des oliviers pour veiller et prier avec lui. Judas a fini par se pendre et le covid-19 sera bientôt vaincu. L’Église revivra dans la joie du ressuscité : notre rôle est celui de Matthias (Ac l, 23). Justement, a conclu Benoît XVI, « ce dernier fut choisi, ainsi "il fut associé aux onze Apôtres" (Ac 1,26). Nous savons seulement de lui qu'il avait été témoin de toute l'histoire terrestre de Jésus (cf Ac 1.21-22), lui restant fidèle jusqu'au bout. A la grandeur de sa fidélité s'ajouta aussi l'appel divin à prendre la place de Judas, presque pour compenser sa trahison. Nous tirons ici une dernière leçon pour nous : même si dans l'Église ne manquent pas les chrétiens indignes et traîtres, il revient à chacun d'entre nous de compenser le mal qu'ils ont accompli par notre témoignage limpide à Jésus Christ, notre Seigneur et notre Sauveur. »

Abbé Marc MATONDO - presbytère de Nay

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